Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière

par | Jan 15, 2024 | Europe, Expositions, France

Le Palais Lumière d’Évian propose une très belle rétrospective intitulée Félix Ziem (1821-1911), Saisir la Lumière jusqu’au 21 avril 2024 sous l’égide des commissaires d’exposition Charles Villeneuve de Janti et William Saadé. Félix Ziem incarna l’image d’un peintre voyageur pré-impressionniste et orientaliste. L’exposition propose un florilège de pas moins de 100 œuvres déclinées en peintures, aquarelles, dessins et croquis de carnets de voyage en accord avec une scénographie de Julia Dessirer. Cette présentation met en exergue le thème de la lumière et des reflets sur fond de musique contemporaine. Les œuvres exposées sont pour la plupart issues d’une donation faite par l’artiste de son vivant au Petit Palais, musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris.

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Paul Marsan dit Dornac. Félix Ziem dans son atelier rue Lepic. Tirage sur papier citrate. 1907. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Paul Marsan dit Dornac. Félix Ziem dans son atelier rue Lepic. Tirage sur papier citrate. 1907. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Les débuts de Félix Ziem

Issu d’une famille d’émigrés polonais, le père de l’artiste exerça le métier de tailleur à Beaune en Bourgogne. Ce dernier inscrit Félix à l’École des Beaux-Arts de Dijon afin qu’il se destine à une carrière d’architecte où le jeune homme bénéficia d’une bourse. L’élève quittera l’établissement, suite à un différend avec la direction et partira s’installer à Marseille chez son demi-frère pour se consacrer à l’aquarelle. En 1839, au cours d’une mission sur le Canal du Midi en tant que conducteur de travaux pour l’entreprise Montricher, Félix Ziem rencontrera le Duc D’Orléans. Il lui offrira une de ses aquarelles et s’en suivront trois commandes successives par le duc. Grâce à cette consécration, l’artiste s’adonnera désormais à la peinture, ouvrant son atelier sur le Vieux-Port à Marseille et se liera d’amitié avec le peintre marseillais Louis-Gustave Ricard qui fera son portrait. Ziem sera aux premières loges de la transformation de Marseille qui va rapidement faire partie des grands ports de la Méditerranée. Il s’installera en 1861 à Martigues, très souvent représentée au fil de son œuvre. Le motif de bateaux aux voilures gonflées s’impose dans ses toiles baignées de lumière et de soleil à l’heure de la création du canal de Suez. Le peintre déclinera une vision romantique de l’orient, de Venise au Bosphore, très inspiré par les toiles de Delacroix.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Félix Ziem (1821-1911). "Sausset, environs de Marseille, la pêche au thon". Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « Sausset, environs de Marseille, la pêche au thon ». Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

L’aquarelliste

En 1841, le peintre part un temps à Nice où ses aquarelles peintes sur le motif concurrencent les artistes anglais locaux. Ziem fidélisera une clientèle huppée dont feront partie le duc de Devonshire et le prince Gagarine. L’aquarelliste excelle dans la maîtrise de la réserve qui se traduit par des plages non colorées, non recouvertes d’encre ou de sépia et qui laissent ainsi apparaître le papier brut de ses aquarelles. L’artiste mettra ainsi en valeur la luminosité des nuages, le scintillement de l’eau et la brillance des rochers. Ses clairs-obscurs sur des ciels crépusculaires sont couverts au premier plan par des arbres en contrejour dessinés à l’encre brune. Les aquarelles de Félix Ziem sont comparées aux travaux de James Whistler. La présentation de 3 carnets de croquis numérisés de Félix Ziem au Palais Lumière d’Évian fera découvrir au public les multiples techniques utilisées par l’artiste pour ses dessins préparatoires.: plume, lavis de sépia, encre de Chine ou d’aquarelle.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Félix Ziem (1821-1911). "La Camargue, coucher de soleil". Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « La Camargue, coucher de soleil ». Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

 

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Félix Ziem (1821-1911). Carnet n°1. Quatre études de paysage / Deux études de paysage (page 66&67). Plume et lavis d'encre brune et crayon, vers 1850. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). Carnet n°1. Quatre études de paysage / Deux études de paysage (page 66&67). Plume et lavis d’encre brune et crayon, vers 1850. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

 

Un artiste nomade séduit par l’Orient

Félix Ziem sera séduit par les lumières du sud de la Méditerranée et affectionnera particulièrement Venise où il effectuera plus de vingt séjours. Il se fera même installer un atelier flottant pour y immortaliser les meilleurs points de vue. Dès 1842 le peintre partira explorer le monde pour développer l’exploration de divers sujets. Il ne reviendra à Paris dans son atelier de la rue Lepic principalement pour rencontrer ponctuellement ses marchands. L’artiste nomade embarquera pour un unique voyage à Constantinople en juin 1856, faisant un périple en Égypte, au Liban, en Syrie puis en Grèce et en Sicile. Ce parcours influencera son rêve d’Orient transcrit dans les toiles de Félix Ziem, à la recherche constante des fééries de la lumière. Dans un de ses carnets de note, le peintre écrira à propos de Constantinople:

« … Mes aspirations ne me trompaient point car c’est ici la chaleur, l’harmonie colorée et enveloppée sur les formes les plus variées, les plus pittoresques, celles qui réjouissent l’oeil et l’amuse… ».

Félix Ziem peint un Orient rêvé. Très proche de l’écrivain Théophile Gautier, il se nourrira des textes de ce dernier qui visita les mêmes sites que lui.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Félix Ziem (1821-1911). "Bazar à Constantinople". Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « Bazar à Constantinople ». Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Felix Ziem (1821-1911). "Constantinople, le caïque de la Sultane". Huile sur toile. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Felix Ziem (1821-1911). « Constantinople, le caïque de la Sultane ». Huile sur toile. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/aufildeslieux.fr/Félix Ziem (1821-1911). "La douane à Venise". Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « La douane à Venise ». Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Un rapport privilégié avec les marchands d’art

Félix Ziem peint de manière compulsive et produira au cours de son existence pas moins de 6000 peintures et 10 000 dessins. Il obtiendra des achats officiels grâce à diverses participations au Salon Parisien mais rencontrera un grand succès financier surtout grâce à ses marchands d’art bien que peu soutenu par les critiques d’art. Entre 1850 et 1854, les 2/3 de ses ventes proviendront d’achats d’amateurs. Le quartier Drouot à Paris devient la plaque tournante de la commercialisation des œuvres du peintre par une trentaine de marchands de tableaux qu’il mettra en compétition. Un de ses marchands, Paul-Durand Ruel, connu pour son écurie de peintres impressionnistes, dira de Félix Ziem « qu’il aimait surtout l’argent ». Ce dernier entretiendra des rapports privilégiés avec le marchand d’art Beugniet et 1872 sera une année record pour les ventes de l’artiste avec principalement des vues de Venise. La technique de peinture de Ziem s’uniformise; il se spécialise dans les vues de Venise, d’Istanbul ou de Marseille composées au tiers inférieur d’une étendue d’eau avec des monuments en arrière plan et d’un ciel immense.

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/Félix Ziem (1821-1911). "Venise, le pont des Soupirs". Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « Venise, le pont des Soupirs ». Aquarelle sur papier. XIXème siècle. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

La donation au Musée du Petit Palais

En juin 1905, à l’âge de 84 ans, Félix Ziem fera une donation d’un ensemble d’œuvres d’atelier signées au Petit Palais. Ce fait est très rare car souvent les legs d’artistes sont faits post-mortem. La donation exposée dans une galerie de 130 mètres carrés comprendra 56 peintures, 74 études peintes à l’huile, 41 aquarelles, 5 carnets de dessins et un dessin à la plume. Une grande marine vénitienne, Le Coup de canon, remportera un vif succès auprès de la presse. L’inauguration officielle se fera en décembre de la même année. D’autres donations de collectionneurs seront faites après la mort du peintre au Musée Ziem de Martigues, ville où il vécut une partie de sa vie. Le musée comporte un ensemble de tableaux de Félix Ziem dans le cadre de son fonds permanent situé au 1er étage.

 

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/ aufildeslieux.fr/"Coup de canon". Huile sur toile. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Félix Ziem (1821-1911). « Coup de canon ». Huile sur toile. Musée des Beaux-Arts de la Ville de Paris, Petit Palais.

Découvrir le Palais Lumière d’Évian

La traversée du lac Léman depuis Lausanne est teintée d’une luminosité exceptionnelle, ceinturée de montagnes et de glaciers. Évian, ville lacustre et forte de son passé thermal, apparaît au loin avec ses toitures colorées. À quelques encablures de marche le long des quais où trône une exposition de bois flottés, le Palais Lumière, construit en 1902 par Ernest Brunnarius, se dresse majestueux depuis sa rénovation au début des années 2000. Sa façade céramique s’ouvre sur une entrée monumentale et un hall grandiose, qui servait autrefois de salle d’attente et de buvette. Quatre statues créées par le sculpteur Louis-Charles Beylard encadrent un magnifique plancher en marqueterie. Cet espace très impressionnant baigne dans une lumière douce répandue à travers des vitraux aux motifs floraux. On remarquera deux toiles représentant des nymphes de part et d’autre de l’entrée signées par Jean Benderly, un élève de Pierre Puvis de Chavannes (1824-1898). L’entreprise Chatillon Architectes a été chargée de la restauration du bâtiment de 2004 à 2006. Les anciens thermes ont été reconvertis à la fin des travaux en centre culturel et de congrès, accueillant deux fois par an des expositions d’envergure internationale réparties sur 550 mètres carrés. La programmation est assurée par William Saadé, conservateur en chef honoraire du patrimoine, ex conservateur de musées et commissaire d’exposition du Palais Lumière depuis 2005. Le programme des expositions a pour ambition de mettre en lumière des périodes artistiques mal connues du public et parfois décriées.

Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/ aufildeslieux.fr/ Palais Lumière d'Évian © DR

Palais Lumière d’Évian © DR

 

 Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/ aufildeslieux.fr/ Sculpture de Jean Benderly © K.HIBBS

Sculpture de Jean Benderly © K.HIBBS

 

 Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière/ aufildeslieux.fr/ Vitrail Art nouveau du Palais Lumière d'Évian © K.HIBBS

Vitrail Art nouveau du Palais Lumière d’Évian © K.HIBBS

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Renseignements pratiques

Exposition Félix Ziem (1821-1911), Saisir la lumière
Du 17 décembre 2023 au 21 avril 2024
Palais Lumière -Évian 
Quai Besson
74500 Évian-les-Bains

Téléphone : 04 50 83 15 90
Tous les jours de 10h à 18h.
Lundi, mardi de 14h à 18h
Ouvert le mardi matin pendant les vacances scolaires.
Visites guidées tous les jours à 14h30.

Y aller

Depuis Lyon TER en 3 heures
TGV direct Paris-Lausanne puis navette avec la CGN tous les jours en 35 mn pour traverser le lac Léman jusqu’à Évian.

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