La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre

par | Mar 11, 2024 | Escales, Europe

 

Indispensable aux humains, le sel, depuis l’antiquité, a fait l’objet de troc, de commerce, de profit, de conflits et de lois. Aujourd’hui, on produit environ 240 millions de tonnes de sel par an dans le monde, dont 39 millions en Europe. En Pologne, à quelques encablures de Cracovie,  la mine de sel de Wieliczka , véritable voyage dans les entrailles de la terre, vous fera découvrir que le sel se décline également sous la forme d’œuvres d’art, égrenées le long d’un parcours entre chapelles, lacs souterrains et pas moins d’une vingtaine de chambres situées au cœur de la mine en activité depuis le 13è siècle. Le site a été inscrit par l’UNESCO sur la 1ère liste du Patrimoine Mondial de la Culture et de la Nature le 8 septembre 1978. Les galeries, puits et lacs s’y déploient sur 300 km avec une profondeur s’échelonnant de 64 à 327 mètres sur 9 niveaux. Après la descente de 360 marches pour atteindre le premier niveau, trois heures fascinantes nous téléportent dans l’univers rude des mineurs, à la fois travailleurs acharnés et artistes autodidactes. Dans ce dédale labyrinthique, certains espaces nous font penser au décor du film Métropolis de Fritz Lang et de sa ville basse.

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Chambre Michalowice , avec fragment de soutènement en bois et lustre de sel. Photo© K.HIBBS

Chambre Michalowice , avec fragment de soutènement en bois et lustre de sel. Photo© K.HIBBS

À l’origine

En 3500 avant J.C. les habitant s’approvisionnaient dans les sources et les lacs salés avoisinants de Wieliczka. Le sel y était obtenu par évaporation sur le feu des saumures bouillies ou par saunage des sources salines. Les polonais chassaient et avaient besoin de sel pour la conservation des aliments. Les premières traces de saunage dans les environs de Cracovie datent du milieu du néolithique (3500-2500 av. J.C.). Les lacs étaient creusés de plus en plus profondément au fur et à mesure des besoins grandissants jusqu’à atteindre les premières mottes de sel gemme. Wieliczka était surnommée Magnum Sal au Moyen-âge ( « Wielka Sól  » en polonais qui donna son nom à la ville). Le sel conserva son caractère et son rôle de monnaie jusqu’au début du 13è siècle. A cette époque, l’exploitation du sel était encore saisonnière avec une production annuelle variant entre 7000 et 8000 tonnes concentrée sur le premier niveau de la mine et de ses quatre puits. C’est surtout à partir du 13è siècle, période de renaissance urbaine et de progression démographique, que la croissance économique entraîna l’essor des industries, l’intensification des échanges et l’augmentation de la production de certains produits de consommation, dont le sel. Celui-ci était un précieux conservateur d’aliments et servait également au tannage des peaux, à la fabrication de l’alun et du verre. Au 14è siècle, Casimir III Roi de Pologne fut à l’origine des premières lois minières en promulguant en 1368 le Statut des Salines de Cracovie ( Zupy Krakowskie) .

 

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Façade principale de la mine de sel de Wieliczka-Photo © K.HIBBS

Façade principale de la mine de sel de Wieliczka- Photo © K.HIBBS

 

 

 

Il n’aurait pas pu le faire sans les revenus tirés de l’extraction du sel, qui représentaient jusqu’à 1/3 des revenus du trésor royal. Ces profits élevés lui permirent, entre autres, de fonder l’université Jagellonne en 1364 en tant qu’ « Académie de Cracovie de Pologne ». Le sel constituait un précieux moyen de paiement dans l’économie du pays et un important instrument de l’exercice du pouvoir. Au 14è siècle les salines faisaient vivre la cour, les cochers, les musiciens, l’apothicaire et le médecin du roi. Durant la dynastie des Sigismond, elles fournirent l’argent nécessaire au remaniement du château de Wavel. Au tournant du 16è siècle, la mine de sel de Wieliczka devint la plus grande exploitation minière d’Europe. Le gisement y était exploité selon les techniques minières traditionnelles de creusement de galeries  puis d’extraction de blocs de sel. Des puits distincts permettaient de remonter l’eau, susceptible de provoquer, comme ce fut vraisemblablement le cas dans l’antiquité, des effondrements de plafonds et l’ennoyage de la mine. Entre 1772 et 1918, les autorités autrichiennes géraient ces salines, ne lésinant pas sur les améliorations techniques et nouvelles méthodes de travail vouées au site. L’extraction se faisait à l’aide de poudre à canon et de machines à vapeur, on créa une ligne de chemin de fer souterraine et on installa une centrale électrique.Ce moment de prospérité dans le commerce du sel, enrichit les familles qui se firent édifier un théâtre et de petits palais dans la ville de Wieliczka. En 1857, une ligne de chemin de fer reliait la ville minière à Cracovie. La mine redevint propriété de l’État à l’indépendance de la Pologne le 11 Novembre 1918. L’exploitation du site de sel gemme dura plus de 700 ans durant lesquels on creusa 26 puits et 9 millions de m³ d’excavations minières.

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Sculpture de sel représentant le buste du roi Casimir-le-Grand réalisée par le sculpteur Wladyslaw Hapek (1968)- Photo © Katherine HIBBS

Sculpture de sel représentant le buste du roi Casimir-le-Grand réalisée par le sculpteur Wladyslaw Hapek (1968)- Photo © Katherine HIBBS

 

 

Une histoire d’hommes avant tout

Les saliniers durant la dynastie des Jagellon étaient particulièrement protégés par leurs différents monarques. Il n’y avait aucun passe-droit possible sans autorisation spéciale, on ne pouvait pas les déranger durant leur travail pour visiter la mine ou recevoir du sel gratuitement. Il n’a pas été possible de recenser le nombre de mineurs avant les années1960 où l’on comptait 2000 ouvriers parmi lesquels 1000 mineurs de fond qui dynamitaient et étaient chargés du transport. Les autres mineurs obtenaient le sel par évaporation et le raffinaient à ciel ouvert. La profession était organisée en différentes confréries: les plus expérimentées dirigeaient les travaux et creusaient, les charpentiers installaient des boisages ( soutènements en bois de mélèze des excavations souterraines) au fur et à mesure que la mine était creusée pour sécuriser les lieux. Au 15è siècle, l’activité prenant une grande ampleur commerciale, des charretiers et des garçons d’écurie furent embauchés pour assurer le transport avec des chevaux. On comptait également des forgerons et des tonneliers. Le sel était chargé dans des tonneaux placés sur des traîneaux servant au transport horizontal. La chambre Sielec, située à 570 mètres du commencement de la visite, présente une jolie collection de dispositifs de transport de sel. Le dernier cheval nommé Baska, ayant participé au transport, quitta la mine en 2002. Pour assurer la conservation des chantiers souterrains d’extraction et éviter leur effondrement on utilisa jusqu’au début du 20è siècle des piliers de sel et des piles de bois dans chaque chambre. Les piles de bois présentaient cependant des dangers car une lampe à huile renversée par inadvertance suffisait à provoquer de terribles incendies, ce qui fut le cas en décembre 1644. C’est entre les 16è et 18è siècles que la mine prit son plein essor.

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/ illustration de James Ross Browne " Cutting off the salt" DR

illustration de James Ross Browne  » Cutting off the salt » DR

 

 

Les Pénitents, gardiens de la sécurité dans la mine

La présence de gaz de méthane ( équivalent du grisou des mines de charbon) s’est justifiée par la décomposition au fil du temps, d’algues et de matières organiques provenant du niveau de la mer. Les mineurs utilisaient des bougies et des lampes à huile pour se déplacer dans l’obscurité, ne pouvant pas sentir ce gaz inodore et incolore. En 1645 la présence de méthane provoqua une explosion au contact de la flamme et la mine brûla durant 8 mois. Les pompes à eau n’existant pas, les mineurs furent obligés de boucher la mine. Après ce tragique épisode, les vieux mineurs les plus expérimentés, s’avançaient à genou ou ventre à terre, couverts de haillons mouillés en approchant de longues torches le long des parois pour brûler le méthane. Surnommés  » Pénitents« , leur prise de risque était très bien rémunérée. Les mineurs étaient engagés par l’État. Ils provenaient pour la plupart, de classes sociales supérieures et recevaient un bon salaire.

 

Une légende à laquelle on aime toujours croire

Lors de la visite de la mine de Wieliczka, la chambre Janowice nous attend à 63,8 mètres de profondeur au niveau I. Creusée dans un bloc de sel durant le début du 17è siècle, 6 statues de sel, sculptées par le mineur Mieczyslaw Kluzek, y furent placées en 1967 pour illustrer la légende du prince polonais Boleslas le Chaste et de sa promise Kinga  ( Cunégonde), fille de Bela VI, roi de Hongrie. Une jolie légende nous emmène dans les plaines marécageuses de la Puszta en Hongrie où pâturaient des chevaux sauvages. Le roi de ces terres avait une fille prénommée Kinga qui se fiança avec le polonais Boleslas et reçut de ses mains une superbe bague de fiançailles. Le jour du mariage quand elle dut partir pour la Pologne, le roi Bela voyant sa fille mélancolique lui offrit une de ses mines de sel située à Marmarosz.. Avant de partir la princesse se rendit à la mine de sel et y perdit malencontreusement sa bague dans le puits. La princesse Kinga et son fiancé cherchèrent en vain la bague et durent partir. Avant d’arriver à Cracovie, l’attelage s’arrêta dans le village de Wieliczka pour s’y ravitailler en eau. Les villageois creusèrent un puits pour désaltérer les voyageurs et leurs chevaux. On creusa inlassablement jusqu’à buter dans un immense bloc de sel qui fut remonté à la surface. A l’intérieur, entre les morceaux éparpillés de sel, brillait de mille feux la bague de la princesse. Bon nombre d’historiens ont contesté cette légende attestant le déplacement inexpliqué du sel contenant la bague de Hongrie en Pologne. Selon l’écrivain Adam Schröter (16è siècle) des colons venus de Hongrie, très au fait des méthodes d’exploitation des mines de sel, s’installèrent près de Cracovie. Il semblerait assez probable que le souverain polonais Boleslas, qui entretenait de bonnes relations avec la Hongrie, ait fait venir des spécialistes hongrois pour y trouver des mines de sel. Plus tard au 19è siècle une autre théorie favorisa la version d’une bague jetée par la princesse Kinga dans un puits de Maramarosz en Hongrie pour sceller à jamais son attachement à son pays natal. Des mineurs hongrois venus en Pologne l’auraient rendue à la princesse avec le premier bloc de sel découvert  dans le village de Bochnia situé à 35 km de Wieliczka..

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Chambre Janowice , " La Grande Légende", groupe de sculptures de sel par le mineur Mieczyslaw Kluzek -1967-Photo©K.HIBBS

Chambre Janowice ,  » La Grande Légende », groupe de sculptures de sel par le mineur Mieczyslaw Kluzek -1967-Photo©K.HIBBS

 

Des chapelles pour la messe matinale des mineurs

Le vide, l’obscurité et la peur ont motivé des générations de mineurs à donner un sens à leur quotidien. La mine a pris en compte la pensée, le travail ardu et parfois la mort de ces hommes. Dès l’aube, les mineurs se rendaient quotidiennement à la messe dans une des chapelles de la mine pour se sentir protégés avant de s’enfoncer dans la gueule noire du puits. La chapelle St Antoine, ( patron protecteur des mineurs de fond) est le lieu de dévotion le plus ancien de la mine. Elle fut bâtie entre 1690 et 1710 dans un style baroque. La seconde chapelle Sainte-Croix, située au niveau II à 91 mètres de profondeur, a été rendue accessible au milieu du 19è siècle. La construction est encadrée de 2 colonnes de sel gemme dont les chapiteaux sont ornés de motifs végétaux. Agenouillés devant un Christ crucifié en bois se trouvent deux statues de sel de moines, érodées par le temps. Ce sont certainement les inscriptions retrouvées dans les galeries souterraines qui témoignent le plus de la foi et de la ferveur des mineurs de Wieliczka.  Au sein de la chapelle, les sculptures et bas-reliefs se succèdent pour raconter la vie, la mort et la résurrection du Christ. De talentueux mineurs contemporains ont également laissé leurs œuvres dans ce lieu sacré,

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Chapelle de la Ste Croix , dans l'autel le Christ crucifié, sculpture en bois du 19 è siècle. Photo© K.HIBBS

Chapelle de la Ste Croix , dans l’autel le Christ crucifié, sculpture en bois du 19 è siècle. Photo© K.HIBBS

L’art remarquable des mineurs dans la chapelle Sainte Kinga

Cette troisième chapelle est certainement le lieu le plus spectaculaire abrité au sein de la mine de sel de Wieliczka. Ce sanctuaire fondé en 1896 s’étend sur 54 mètres de long, 18 mètres de large et 12 mètres de haut sur 2 niveaux. La famille de mineurs Markowski réalisa des sculptures très remarquables. Józef Markowski, né en 1860 réalisa la chapelle Sainte Kinga. Après avoir commencé à faire de la sculpture sur bois dès l’âge de 16 ans, il sculpta le sel lorsqu’il travaillait au fond de la mine. Il élabora le projets de bas-reliefs d’après des publications religieuses. Józef dessinait ses esquisses au charbon de bois sur les parois. Le jeune prodige sculptait avec les outils des mineurs utilisés pour les blocs de sel et utilisait un simple rasoir pour les finitions et les détails. Le sculpteur autodidacte était aidé par son frère Tomasz et d’autres mineurs. Józef Markowski élabora le maître-autel divisé en 3 parties. Dans sa partie centrale se trouvait à l’origine un tableau peint à l’huile exécuté par l’artiste Ferdynand Olesinski  (disciple de Jan Matejko) représentant Sainte Kinga et un mineur lui remettant un anneau trouvé dans un bloc de sel. Ce tableau fut remplacé en 1914 par une statue de sel de la même sainte. L’œuvre de ce grand sculpteur a été poursuivie jusqu’en 1963 par Antoni Wyrodek.

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/La chapelle Sainte Kinga -Vue d'ensemble- Photo© K.HIBBS

La chapelle Sainte Kinga -Vue d’ensemble- Photo © K.HIBBS

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Tableau peint à l'huile exécuté par l'artiste Ferdynand Olesinski 1859-1905 (disciple de Jan Matejko) représentant Sainte Kinga et un mineur

Tableau peint à l’huile exécuté par l’artiste Ferdynand Olesinski 1859-1905 (disciple de Jan Matejko) représentant Sainte Kinga et un mineur

 

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Chapelle Ste Kinga,fragment du maître-autel et statue de sel de Ste Kinga par Józef Markowski ,1914. Photo © K.HIBBS

Chapelle Ste Kinga,fragment du maître-autel et statue de sel de Ste Kinga par Józef Markowski ,1914. Photo © K.HIBBS

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/ Chapelle Ste Kinga, bas-relief de sel " Ls Noces de Cana" par Antoni Wyrodek 1929-Photo© K.HIBBS

Chapelle Ste Kinga, bas-relief de sel  » Ls Noces de Cana » par Antoni Wyrodek 1929-Photo© K.HIBBS

 

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Chapelle Ste Kinga, bas-relief de sel " La Cène" réalisé par Antoni Wyrodek d'après la fresque de Leonardo da Vinci -Photo © K.HIBBS

Chapelle Ste Kinga, bas-relief de sel  » La Cène » réalisé par Antoni Wyrodek d’après la fresque de Leonardo da Vinci -Photo © K.HIBBS

Le sel de Wieliczka, loué par les poètes, les scientifiques et les grands voyageurs du 19è siècle

Les premiers visiteurs vinrent dès le Moyen-Âge. Parmi eux, on comptait Nicolas Copernic, le célèbre astronome polonais qui visita la Mine au 15è siècle. Un hommage lui fut rendu en 1973 avec une sculpture de Wladyslaw Hapek pour le 500è anniversaire de sa naissance. Le poète allemand du 16è siècle, Adam Schröter, écrivit l’ouvrage en 1565 Regni Poloniae Salinarum Vieliciensium Descriptio, poème contenant une quantité de descriptions de la mine, qui lui valut sa célébrité. L’auteur y indique la situation de la mine de Wieliczka, les différentes espèces de sel qu’on y trouve ainsi que l’importance des salines pour l’État. Le poète évoque également l’origine du sel créé par Dieu sous la forme de sel, de souffre et d’Antimoine. Adam Schröter décrit les propriétés sanitaires du sel comme étant  » un baume admirable pour l’intérieur et l’extérieur « . Par ailleurs, toujours selon l’auteur, sans le sel  « on ne saurait liquéfier l’or, c’est la base de l’élixir philosophique « . Les écrits de Schröter incluent les œuvres de l‘alchimiste Paracelse à ses propres poèmes. Il mentionne également la légende autour du mariage de Bolestas le Chaste sous le règne duquel les Salines furent découvertes. Dans son ouvrage, Schröter rapporte le nom des différents endroits de la mine, donnant des détails sur les machines et les ouvriers qui y travaillent. Johann Wolfgang Von Goethe, romancier, poète et scientifique s’intéressa également à la géologie et se rendit dans la mine de sel où une statue lui est dédiée.

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Nicolas Copernic, statue sculptée dans le sel par Wladyslaw Hapek (1973)-Photo © K.HIBBS

Nicolas Copernic, statue sculptée dans le sel par Wladyslaw Hapek (1973) Photo © K.HIBBS

 

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/Statue de Johann Wolfgang Goethe réalisée en 2001 par le mineur-sculpteur Józef Piotr Kowalczyk© Photo K.HIBBS

Statue de Johann Wolfgang Goethe réalisée en 2001 par le mineur-sculpteur Józef Piotr Kowalczyk© Photo K.HIBBS

 

 Rencontre avec Malgorzata Piera, autrice de Voyages à Wielicza en diligence

Au Fil Des Lieux a eu le plaisir de réaliser un entretien avec la philologue et autrice polonaise Malgorzata Piera. Cette passionnée d’histoire a d’abord travaillé durant 25 ans au sein du musée des mines de sel de Wieliczka en tant qu’adjointe au département des publications. Son rôle consistait à la rédaction et à la certification de documents historiques et scientifiques relatifs à la mine de sel et à la ville de Wieliczka. L’ensemble de ces articles ont été publiés dans la revue académique  » Études et documents relatifs à  l’histoire des salines en Pologne ». Grâce à l’accumulation de ses nombreuses recherches, Malgorzata Piera a publié 2 ouvrages : An American tourist in the salt mine of Wieliczka ( Un touriste américain dans les mines de sel de Wieliczka- récit méconnu du 19è siècle) et To Wieliczk by stagecoach or the memoirs  of English-speaking travellers (18th/19th century) ( Voyages en diligences à Wieliczka  ou mémoires de voyageurs anglophones au 18è/19è siècle).

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/illustration de James Ross Browne " Visiting the salt mine" DR

illustration de James Ross Browne  » Visiting the salt mine » DR

 

AFDL: Quel sujet vous a le plus inspiré durant ces recherches?

 » J’ai été très impressionnée par les liens méconnus entre les voyageurs étrangers et la mine de sel de Wieliczka. J’ai découvert un premier document datant du 19è siècle concernant John Ross Browne, un journaliste, diplomate et voyageur américain dont les aventures et écrits ont inspiré Mark Twain. Il vint en Europe avec sa famille et se rendit en Pologne pour visiter les mines de Wieliczka. Ses merveilleuses descriptions accompagnées de ses propres illustrations furent éditées en 1866. Cet ouvrage était fascinant à lire pour quiconque s’intéresse aux récits de voyages ou d’histoire européenne.Sa visite en Pologne résultait de son désir de s’immerger dans cette  » ville souterraine » . John Ross Brown fait une impressionnante description de sa descente dans les entrailles de la mine, attaché à une corde. L’univers de la mine apparaît comme le royaume mystique de l’obscurité. Ses descriptions s’attachent également aux équipements ainsi qu’au quotidien des mineurs. J’ai réalisé que personne n’en parlait dans nos articles et livres de musée. J’ai donc traduit son aventure et préparé un premier livre  » Un Américain à Wieliczka » sur les voyages d’étrangers venus dans cette mine. Plus tard j’ai découvert des détails historiques et j’ai commencé à rédiger Voyages en diligence à Wieliczka. L’écriture a constitué à elle seule un formidable saut dans le passé d’autant plus que je m’intéresse à l’histoire des gens ordinaires, à leur vie et  à leurs émotions  « .

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/illustration de James Ross Browne " Descending to the mine" DR

illustration de James Ross Browne  » Descending to the mine » DR

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/illustration de James Ross Browne " Fête dans le grand hall de bal" DR

illustration de James Ross Browne  » Fête dans le grand hall de bal » DR

 

AFDL: Qu’est -ce qui intéressait le plus les visiteurs ?

 » Ils admiraient particulièrement la chambre de bal Letów , les lacs souterrains et décrivaient leur descente au fond de la mine en glissant le long d’une corde.Ces voyageurs venaient principalement pour profiter du spectacle souterrain enveloppé de légendes et de mystères. Ils avaient l’opportunité d’y découvrir les mineurs au travail.  La mine de Wieliczka fut mondialement populaire au 19è siècle « .

AFDL: Qui étaient ces voyageurs?

 » La mine de sel attira de nombreux nobles et aristocrates, ecclésiastiques, politiciens, journalistes et artistes célèbres.Des personnes inconnues voulaient également découvrir ce lieu unique. Dans mon livre sur les voyageurs en diligence, j’ai évoqué des scientifiques tel que l’anglais Robert Townson et Jacques Peschier venu de Suisse. Je cite  également le célèbre globe-trotter anglais James Holman qui était aveugle. Il entreprit une série de voyages en solo en utilisant une méthode d’écholocation humaine. En Octobre 1846 il avait déjà visité tous les continents. Il vint en Pologne entre les années 1822 et 1824. La poétesse anglaise Eliza Craven Green se déplaça à Wieliczka ainsi que le journaliste américain James Walter Smith qui écrivit un article The city of salt paru dans  Strand Magazine ».

AFDL: La France et la Pologne avaient-elles un lien particulier concernant la mine?

 » Les liens dynastiques entre les 2 pays ont fait que la mine de sel a été très fréquemment visitée par les français aux 16è et 17è siècles. Les descriptions les plus marquantes nous viennent du poète Jean Regnard (1682) , de Gaspard de Tende ou encore de Jean Le Laboureur avec sa célèbre comparaison de la mine à une pyramide égyptienne. Au 18é siècle, on trouve également une citation très populaire sur la mine écrite par Jean-Étienne de Guettard  dont le séjour et les études en sciences naturelles en République de Pologne ont donné lieu à des découvertes majeures pour la mine visitée dans les années 1760-1762. »

AFDL: Parlez-moi de vos activités actuelles

 » En plus de la rédaction d’articles, je me passionne depuis 20 ans pour l’herboristerie appliquée à la beauté et au bien-être. J’ai créé des ateliers et je prépare des cosmétiques réalisés de façon artisanale avec des huiles et onguents à base de plantes « .

 

Le Musée des Salines de Cracovie à Wieliczka

La Mine de Sel de Wieliczka est une entité différente du Musée des Salines de Cracovie à Wieliczka ; en tant que musée, il comprend le musée des Salines et une exposition souterraine au troisième niveau de la mine, et est attribué au musée des Salines de Cracovie à Wieliczka ( Muzeum Żup Krakowskich Wieliczka) qui est une société distincte de la mine de sel de Wieliczka. Le Musée des Salines de Cracovie à Wieliczka a ouvert aux visiteurs le 30 septembre 1966, des expositions souterraines présentant l’une des collections les plus modernes et originales sur le monde minier d’Europe. Sa création est due à son fondateur et premier directeur, Alfons Dlugsz, diplômé de l’École nationale des métiers d’art de Berlin et de l’Académie des Beaux-Arts de Dresde. Alors qu’en 1949 l’administration des mines de sel décide de supprimer un certain nombre de puits, Alfons Dlugsz, se rendant compte de la valeur patrimoniale de ces puits, parcourt avec un mineur des dizaines de kilomètres sous terre à la recherche d’outils anciens, de cristaux et de fossiles. Entre 1958 et 1966, il constitue une vaste collection muséale regroupant tous ces trésors. Alfons Dlugsz s’est également révélé être un excellent photographe et peintre.

 

 

La mine de sel de Wieliczka,véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/2096/2/Zb.Spec. Alfons Długosz, Five photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the mine (central pillar in Margielnik chamber), 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo

2096/2/Zb.Spec. Alfons Długosz, Five photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the mine (central pillar in Margielnik chamber), 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo Alfons Długosz

 

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/2097/1/Zb.Spec.Alfons Długosz, Fifteen photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the mine, 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo

2097/1/Zb.Spec.Alfons Długosz, Fifteen photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the mine, 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo Alfons Długosz

 

La mine de sel de Wieliczka, véritable voyage dans les entrailles de la terre/www.aufildeslieux.fr/2097-13 2097/13/Zb.Spec. Collection Alfons Długosz, Fifteen photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the salt mine, 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo

2097-13 2097/13/Zb.Spec. Collection Alfons Długosz, Fifteen photos from the series “Interiors of the mine”, Chamber in the salt mine, 50ties to 60tiesof the 20th century, Wieliczka, photo Alfons Długosz

 

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Visiter la mine de sel de Wieliczka
www.minedeselwieliczka.fr
Prix des billets avec visites en français et/ou en Anglais ici

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Y aller:
En avion: depuis Paris (Roissy CDG), vols directs par la compagnie Easyjet, compter 90 euros pour un aller simple en Mars.
https://www.easyjet.com/fr

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Se loger à Cracovie
1891 Garni Hotel****
https://garnihotel.pl/en/

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Accès à Wieliczka:
En train de banlieue — monter à la gare de Kraków Główny et descendre à la gare de Wieliczka Rynek Kopalnia. De la gare, vous arriverez à la Mine à pied en quelques minutes.

En bus 304 — monter à l’arrêt Dworzec Główny Zachód non loin de la Galeria Krakowska. Descendre à l’arrêt Wieliczka Kopalnia Soli si vous vous rendez au Puits Daniłowicz ou à l’arrêt Wieliczka Rynek si vous vous rendez au Puis Regis. Achetez un billet urbain qui couvre les zones I et II.

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 Renseignements:

Office National du Tourisme Polonais à Paris
10 rue Saint-Augustin
75002 Paris
Tél. : 01 42 44 19 00
Fax : 01 42 97 52 25
e-mail : info.fr@pologne.travel
https://www.pologne.travel/

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À lire

By stagecoach to Wieliczka: or from the memories of English-speaking travelers.
An American in Wieliczka
de l’autrice Malgorzata Piera.
Les 2 ouvrages sont disponibles sur commande et en anglais à la librairie polonaise de Paris- 123 Boulevard St Germain-75006 Paris

Remerciements à Mme Dorota Cora – Muzeum Żup Krakowskich Wieliczka pour l’utilisation à titre gracieux des photographies originales de la collection Alfons Długosz ainsi qu’à Mme Malgorzata Piera pour l’utilisation à titre gracieux des illustrations de James Ross Browne.

Droits réservés texte et photos.

 

 

 

 

 

 

 

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