Le mois d’Août demeure l’emblème français du tourisme balnéaire, notamment avec son éponyme nationale 7 qui fut un trait d’union entre villes et mer. C’est grâce à l’effet bénéfique des Trente Glorieuses de l’après-guerre que les classes moyennes ont pu accéder à des temps de loisirs et acquérir un pouvoir d’achat leur permettant de sillonner la France en automobile !
Aujourd’hui la Grande Motte, classée au Patrimoine du XXème siècle, demeure la preuve vivante d’un projet visionnaire élaboré dans les années 1965 par l’architecte-urbaniste Jean Balladur qui s’impliqua corps et âme dans le concept d’une ville nouvelle. Il concilia structures d’accueil touristique et logements pour les habitants où le béton-roi fut utilisé sous de multiples formes innovantes. Ce grand chantier visait également une symbiose harmonieuse avec des espaces verts comportant plus de 40 000 pins parasol imaginés par le paysagiste Pierre Pillet.
C’est à l’occasion d’une visite à Brasilia en 1962 que Jean Balladur sera fasciné par la qualité plastique du béton utilisé par l’architecte Oscar Niemeyer. La Grande Motte, cette «fille de l’été» telle que Jean Balladur aimait la décrire, sera un défi à la platitude d’un paysage linéaire et surtout au vent qui apportait sécheresse et embruns corrosifs de la mer toute proche !
Une skyline de pyramides s’éleva sur le front de mer dans le quartier du Levant, pilotée par une équipe de 90 architectes, incarna un véritable rôle de bouclier contre le sel et le sable projetés par le vent (4kg de sel au mètre carré par an !). L’urbaniste Jean Balladur dira à cet effet que « l’on n’arrête pas le vent mais on peut le peigner par des constructions judicieusement disposées...». L’utilisation de résilles en béton sur les façades (modénatures) fut non seulement un élément de décoration mais également une protection appréciable contre le soleil. L’aménagement végétal de la ville, conçue comme un parc, devait par ailleurs atténuer les effets du vent et du soleil.
Un précurseur de la ville piétonnière…
Jean Balladur, trente ans durant, de 1963 à 1993, désigné comme architecte en chef par la Mission Racine, s’investira dans un projet de ville à vivre à taille humaine. Il s’agira d’une véritable philosophie de vie, alliant espaces piétonniers et mobilier urbain soigné, ayant pour but d’agrémenter le quotidien de ses habitants et des estivants, nouvelle population en pleine émergence.
Ces idées novatrices furent tout d’abord mal perçues alors que l’ère de la consommation et des belles voitures battait son plein.
L’architecte-visionnaire voulait raconter une histoire d’urbanisme « autrement », très fortement inspiré par les formes pyramidales mexicaines de Teotihuacan. La Grande Motte allait devenir le trait d’union entre le pied de la chaîne des Cévennes et la mer…
La passerelle piétonnière de la St-Jean (une des 6 créées par Balladur), dont la conception en ouverture elliptique sera réglée sur l’horloge du ciel: le 21 juin, jour du solstice d’été, décrit un cercle parfait projeté sur le sol symbolisant aux yeux de Jean Balladur le début des vacances. Comme les Mayas, il vénérait le soleil !
La Mission Racine pilote le projet
A l’origine, la Grande Motte était une dune d’une vingtaine de mètres de hauteur, servant de repère pour les marins au long cours. Son nom viendrait du mot « moutas » qui désigne une motte. La Mission Racine sera désignée pour piloter de grands travaux d’aménagement du littoral languedocien et sera confiée à un énarque, Pierre Racine, Directeur de l’ENA. L’étang du Ponant fut creusé, tous les niveaux rehaussés avec le sable extrait et plusieurs quartiers émergèrent sur 750 hectares: à l’est le quartier du Ponant avec le VVF (devenu un centre de vacances Belambra), au nord le quartier des villas et du golf conçu par le designer américain Robert Trent Jones, créateur de 500 golfs en Floride), à l’ouest le quartier du Couchant avec des formes architecturales tout en courbes féminines et au sud le quartier du Levant constituant le centre ville.
Plusieurs unités touristiques seront planifiées ainsi que des ports pour la navigation de plaisance: La Grande Motte, Carnon, le Cap d’Agde, Gruissan, Port Barcarès et Port Leucate.
Aujourd’hui le port de la Grande Motte est mondialement connu grâce au Salon des multicoques qui a lieu en Avril. Depuis 2012 de nouveaux axes de développement ont été identifiés entre architecture et nautisme sans oublier l’extension dans l’aménagement du port qui prévoit 600 à 800 anneaux supplémentaires au vu de succès rencontré avec cette manifestation internationale.
Un florilège d’artistes, ambassadeurs de la ville…
La sculpture fait partie intégrante des différentes réalisations architecturales de la Grande Motte.
Tout a commencé avec le Point zéro, premier bâtiment public réalisé sur la plage. Cette structure est facilement identifiable par sa forme de poisson et sera le gage du démarrage de ce phénoménal chantier urbain auprès du public. C’est à Michèle Goalard que Jean Balladur demandera de créer une sculpture, le mur des méditations, face à la mer sur la terrasse du 1er étage de ce bâtiment public. La volonté de l’architecte était d’intégrer au quotidien des œuvres trop longtemps consignées dans des musées. Les jardins de la Grande Pyramide, immeuble locatif ,frontière entre les quartiers du Levant et du Couchant, sont composés à l’ouest d’un jardin de vagues en briques rouges conçu également par l’artiste Michèle Goalard.
On pourra apprécier également les sculptures en béton d’Albert Marchais qui font penser à des figures de proue de bateaux émergeant des haies de verdure le long des jardins.
L’église St-Augustin dont le mobilier intérieur a été signé par l’architecte lui même possède de remarquables vitraux de Jacques Loire, maître-verrier de Chartres ainsi que des ferronneries de Jean-Jacques Bris.
Un mobilier urbain à l’initiative du design…
Jean Balladur, dans sa quête visionnaire, n’a omis aucun détail: bancs publics en bois et en béton, lampadaires et fontaines.
Ses formes seront rééditées à l’échelle « indoor » par des designer à partir de 2013: c’est la société OXYO qui s’inspirera la première des formes architecturales de la ville en réalisant une lampe fée, un tapis BBB inspiré d’un dessin de Jean Balladur ou encore une chauffeuse résille en métal blanc de François Combaud ainsi qu’une « table blanche minérale » conçue par l’architecte Rudy Ricciotti.
LGM, un terrain de jeu pour la photographe Maria Flore
Durant tout le mois d’Août le public fera l’étonnante découverte de l’exposition Playground , sur l’Avenue de l’Europe, une approche poétique et décalée de la Grande Motte réinterprétée par la jeune photographe Maia Flore de l’Agence VU. Cette enfant de la génération » 100% numérique » a récemment obtenu le prix HSBC pour la photographie en 2015. Maia se met en scène dans divers sites architecturaux sans oublier sa palette graphique pour nous transmettre une bonne dose d’humour et de fraîcheur !
Découvrir la ville autrement…
La Grande Motte est très friande de jeunes talents, cela faisait partie de la philosophie humaniste de Jean Balladur qui communiquait beaucoup avec les futurs architectes. La dixième édition du Festival des Architectures Vives a eu récemment lieu, proposant 8 parcours d’architectures éphémères conçues par des jeunes talents internationaux et disséminées dans la ville ainsi qu’une exposition à la Capitainerie. Ce sont les étudiants en architecture de l’école de Montpellier( où démarre le FAV chaque année) qui ont assuré l’accueil des visiteurs à chacune des étapes.
Le nec plus ultra consiste à découvrir le bord de mer et la ville toute entière en trottinette électrique louée et testée durant quelques minutes d’apprentissage chez Hello City ou bien d’embarquer au Quai d’honneur sur le catamaran Lucile 2 pour avoir une vision panoramique des pyramides depuis la mer !
Déjeuner ou danser les pieds dans le sable…
Pour les aficionados des fiestas de David Guetta, on retournera sur les plages privées de la station à la Voile Bleue, à l’Effet Mer et à la Grande Plage où il vous faudra déguster immanquablement un risotto aux gambas suivi d’un délicieux carpaccio à l’ananas, le tout accompagné d’un verre bien frais de la récente cuvée de la Grande Motte !
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où dormir:
Hôtel Les Corallines ****
615 Allée de la plage
34280 La Grande-Motte
Tel: 04 67 29 13 13
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