À la fraîcheur d’une matinée d’été, l’impératrice Sissi qui séjourna sur le littoral cauchois, n’aurait pas manqué la visite des jardins secrets en Seine Maritime. Qui ne serait pas touché par la dimension esthétique des 24 parcs et jardins ouverts au public du 1er Mai au 2 août prochain disséminés dans le département? Vous aurez certainement l’occasion, le temps d’un week-end estival, de vous rendre dans au moins sept sites remarquables réunissant la beauté des fleurs, les compositions de potagers à l’ancienne ou encore la rencontre étonnante entre parc animalier et botanique. L’art des jardins est également celui de toucher les sens de celui qui les parcourt. Qu’ils soient jardiniers ou paysagistes, visionnaires ou architectes, les concepteurs de ces espaces ont fait corps avec la terre, la faisant exulter de ses plus belles merveilles. Le cheminement nonchalant du visiteur a été longuement prémédité et architecturé par un botaniste. Le travail ne finit jamais et se poursuit prenant le pas sur le cycle des saisons.
Le Parc de Vasterival
Dans ce domaine de 12 hectares, non loin du joli cimetière marin de Varengeville, la Princesse Greta Sturdza, d’origine norvégienne, arracha les fougères et les racines de ce qui n’était au début qu’un bois enchevêtré de racines. Elle pratiquait la technique du Mulch consistant à protéger le sol et à empêcher l’évaporation naturelle de l’eau qu’il contient avec des feuillages (une fonction de compost naturel qui aide à fertiliser le sol en quelque sorte). Durant toutes ses années passées dans le creux de ce joli vallon normand, cette femme de caractère passa la plupart de son temps à tailler et à harmoniser les couleurs de ce véritable tableau vivant où se côtoient azalées, rhododendrons et hellébores, pour ne citer que quelques espèces. La Grande Dame du jardin a tiré sa révérence mais les imposants massifs d’arbres s’inclinent toujours respectueusement en souvenir de l’oeuvre de toute une vie.
La visite ne peut se faire que sur rendez-vous et et vous aurez peut être la chance de la faire accompagné de Didier Willery, directeur technique du lieu et journaliste botaniste parcourant le monde à la recherche de plantes rares. À Vasterival de magnifiques compositions sont parfois issues de graminées volages guidées par le souffle du vent alors que d’autres ont été conçues comme des aquarelles dont la transparence des feuillages éclairent délicatement l’esquisse de vert et rose tendres. La perfection dans la luminosité des écrans de verdure qui se superposent a notamment inspiré l’aquarelliste Catherine Cotelle qui vient souvent travailler au jardin pour des commandes passées par la Princesse Irène, la fille de Greta Sturdza. Il vous sera possible de suivre un stage d’aquarelle et de peinture sur mesure en vous renseignant auprès de l’administration du parc.
Le Parc animalier et botanique de Clères
Petits et grands trouveront leur bonheur dans ce parc aménagé au 19ème siècle par le paysagiste Edouard Busigny et son château revisité par l’architecte Henri Parent. La fonction zoologique du parc qui regorge de plus de 1500 espèces en semi-liberté a été fondé en 1919 par le propriétaire des lieux, Jean Delacour, collectionneur d’espèces rares d’oiseaux.
Les espaces verts sont fortement inspirés de la tendance anglaise «arts and crafts» du XIXème siècle.
Ce mouvement en réaction à la période d’industrialisation en Europe, utilisait beaucoup d’éléments décoratifs romantiques avant que n’arrive les premières influences modernistes.
Le magnifique lac du domaine où évolue une colonie de flamants roses du Chili et des grues couronnées, est alimenté par l’eau de la rivière la Clérette. L’allée qui borde le plan d’eau ombragée par de gigantesques érables argentés et tilleuls communs sera propice à la promenade.
Vous vous retrouverez très certainement nez à nez avec des paons qui déploieront une roue chorégraphiée avec une bonne dose d’arrogance !
Un jardin retrouvé aux accents Renaissance
Direction Château de Martainville et son «jardin retrouvé» situés sur les riches terres céréalières de Seine Maritime! Je suis accueillie par Thierry Hay, responsable des parcs et jardins des sites et jardins départementaux. Il a conçu les dessins et supervisé la réalisation de ce jardin de 3025 mètres carrés débutée en 2011 qui est une réplique réinterprétée d’un jardin Renaissance. L’espace est subdivisé en carrés traversées d’allées perpendiculaires ou diagonales. Ici alternent verveine de Buenos Aires, plantes vivaces et graminées. L’ensemble est ceinturé de poiriers cordons. Une association d’insertion gère les 6 ruches qui se trouvent à un des angles du jardin et la vente du miel est assurée depuis le début du mois.
Cette création a su garder des proportions raisonnables au niveau du coût financier qu’elle a généré en faisant intervenir exclusivement le personnel technique du lieu et Aymeric Huguerre, le jardinier du château… Le château de Martainville qui fait écho à ce jardin constituait le domaine de campagne de Jacques Le Pelletier, son propriétaire. Ce fils de commerçants provençaux achètera le fief de Martainville en 1481. Il faudra attendre 1961 pour la création du Musée des Traditions et des Arts Normands regroupant plus de 15 000 pièce de collection au sein du château.
La beauté et la richesse des meubles (particulièrement les armoires sculptées), étoffes et divers bijoux nous rappellent que cette région est un des plus gros producteurs de lin au monde assurant 40% de la production mondiale. Avec un peu de chance vous pourrez vous croiser en repartant les champs de lin bleu électrique qui font la réputation de la région !
Revivre une nouvelle de Maupassant au Château de Miromesnil…
Guy de Maupassant ne vécut que jusqu’à l âge de 3 ans au château… Il aurait sans doute apprécié le goûter royal qui nous a été réservé par les propriétaires des lieux, Nathalie et Jean Christophe Romatet: tarte aux pommes maison et cidre rosé au milieu de sculptures de chiens en trompe l’oeil qui nous présentaient joyeusement leur arrière train ! Ici tout a gardé un joyeux parfum d’enfance comme dans un livre de la Comtesse de Ségur !
Sauf que la Comtesse et le Comte ici s’appelaient de Vogüé et achetèrent le château en 1938. Un cèdre bicentenaire trône au milieu du parc, témoin muet d’un riche passé.
Nathalie fait preuve d’une énergie débordante naviguant entre la petite boutique du château, le potager de 2500 mètres carrés garni de légumes anciens, le jardin et les deux chambres d’hôtes !
Le potager a une histoire qui lui appartient toute entière: après la deuxième guerre mondiale il fallait nourrir une famille de huit enfants avec le concours d’un jardinier anglais et des conseils de la Princesse Sturdza dont je vous ai parlé. Aujourd’hui,une rotation des cultures est pratiquée chaque année que l’on enrichit avec du fumier de vache ou de cheval.
Des semis sont réalisées dans une petite serre de 6 mètres carrés au fond du jardin .
Les écorces chatoyantes du jardin collection de Bellevue…
J’ai pu profiter d’une très agréable présentation-promenade grâce à la sensibilité très artiste de Martine Lemonnier, ancienne illustratrice aux Editions Gallimard. Quel émerveillement que de découvrir les écorces satinées des prunus serrula du Tibet ou encore les nombreuses fleurs d’hydrangea !
Il vous faudra immanquablement profiter de la belle perspective sur la vallée du Pays de Bray avant de repartir à la conquête d’autres jardins !
Des histoires de roses à Veules et au Mesnil Geoffroy…
Faire une pause déjeuner à Veules- les – roses constituera une exquise parenthèse pour les amateurs de bulots, d’huîtres et de moules accompagnées d’une salade parsemée de graines de lin. Dans ce charmant village où la campagne fait un appel du pied au bord de mer, on a connu un passé de tisserands et de moulins qui fonctionnaient avec l’eau de la Veules sans oublier les cressonnières dont on peut toujours remarquer l’architecture. Un jour de 1897 le facteur mécontent que les lettres de Veules en Caux atterrissent à Veules demanda à la Mairie que l’on rebaptise la ville en Veules-Les-Roses. Les habitants furent totalement convaincus par ce changement quand ils se virent offrir par la municipalité…un pied de roses !
Ce superbe tour des jardins en Seine Maritime s’est terminé par le château de Mesnil-Geoffroy dans la roseraie constituée de 2000 espèces différentes et le potager de légumes anciens romantique de la princesse Anne Marie Kayali. Des ateliers-jardin sont proposés tout le long de l’été sans oublier des chasses au trésor pour les enfants dans le cadre de ce beau château du XVIIIème !
Parc de Vasterival
346 Allée Albert Roussel 76119 Sainte-Marguerite-sur-mer.
Sur rendez-vous exclusivement
Pour les visites et le stage d’aquarelle avec Catherine Cotelle:
Tel 02 35 85 12 05
www.vasterival.fr
Château-Musée de Martainville
76116 Martainville-Epreville.
Tel : 02 35 23 44 70
www.chateaudemartainville.fr
Parc animalier et botanique de Clères
76690 Clères
Tel : 02 35 33 23 08
www.parcdecleres.net
Jardins de Bellevue
Le Bourg 76850 Beaumont le Hareng
Tel:02 35 33 31 37
www.jardin-de-bellevue.e-monsite.com
Château de Miromesnil
76550 Tourville-sur-Arques
Tel : 02 35 85 02 80
www.chateaumiromesnil.com
Potager & roseraie du château de Mesnil-Geoffroy
76740 Ermenouville
Tel : 02 35 57 12 77
www.chateau-mesnil-geoffroy.com
Veules-les-roses: visites guidées du plus petit fleuve de France et du village fleuri
Renseignements à l’Office du tourisme.
Tel : 02 35 97 63 05
Itinéraire les Jardins secrets de Seine Maritime
www.seinemaritime.fr
Mes vifs remerciements au CDT 76 pour son soutien sans oublier l’hôtel de la plage à Dieppe, le restaurant le P’tit Veulais pour ses huîtres, ses fruits de mer et glaces à la ferme et le Clos de la Roseraie à Clères.
Hôtel de la plage
20 boulevard de Verdun 76200 Dieppe
Tel : 02 35 84 18 28
Restaurant le P’tit Veulais
1 rue du Docteur Girard 76980 Veules les roses
Tel : 02 35 97 59 19
Restaurant Le Clos de la Roseraie
48 Place des halles 76690 Clères
Tel : 02 35 37 72 10
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