Far la Routo dans les Alpes de Haute-Provence est une tradition remontant au 13è siècle lorsque les éleveurs du Piémont faisaient transhumer leurs troupeaux par la France. Le terme vient de l’occitan et désigne la transhumance. Celle-ci fait partie de l’héritage culturel pastoral des Alpes de Haute-Provence et de la préservation de ses pratiques. Ella a pour but de maintenir l’équilibre dans la triangulation hommes-animaux et écosystèmes. Chaque année en été et en automne, des milliers d’animaux sont conduits par des gardiens de troupeaux, accompagnés de leurs chiens selon des itinéraires fixes, entre deux régions géographiques et climatiques. L’été dans les plaines de Provence il fait très chaud, l’herbe est trop sèche et l’on emmène les troupeaux dans les alpages plus verdoyants. On attendra fin octobre pour la davalade (redescente) dans la plaine. Traditionnellement le réseau routier des bergers se faisait le long de drailles et de carreres, pistes tracées depuis le 13è siècle, souvent renforcées par des murets et pour la plupart disparues aujourd’hui. L’itinéraire s’étalait entre les plaines de Basse Provence et les montagnes alpines. On retrouve également de nombreuses gravures sur pierre disséminées dans le paysage, témoignant des différents passages de bergers sur ce territoire. La transhumance a changé de visage depuis les années 50 où, durant trois semaines de marche, le berger menait sur 400 kilomètres les moutons de La Crau (un triangle de 500 mètres carrés formé par l’ancien delta de la Durance) jusque à la vallée de la Stura. Aujourd’hui la plupart des tronçons du parcours sont assurés en bétaillères pour monter à l’estive ( alpages d’été). Cette tradition a retrouvé un nouvel élan grâce à différents organismes tels que la Maison de la Transhumance à Salon de Provence et la Routo© qui propose de faire revivre les itinéraires d’autrefois entre Arles, Eguilles, Valensole et la Seine-les Alpes par la marche en empruntant le GR69.
La Maison de la Transhumance
Cette association existe depuis 25 ans et a pour vocation de valoriser la pratique de la transhumance ainsi que l’ensemble des savoir-faire et des produits qui en sont issus. Depuis sa création elle réunit des personnes de la culture, de l’environnement, de la science et de l’élevage. Elle intervient dans divers lieux tels que les écoles et autres événements pour toucher un large public. L’association a fait toute une recherche sur les anciennes drailles de transhumance qui n’ont pas été protégées en France mais étaient référencées au cadastre napoléonien. On les a repérées et transformées pour donner naissance en association avec la fédération française de randonnée en chemins praticables à pied avec la création du GR69 La Routo. La Maison de la Transhumance met en lumière également le métier de berger- bergère et d’éleveur ainsi que l’ensemble des produits avec la viande issue de l’élevage pastoral et les fromages.Tous les élevages caprins et bovins sont également valorisés auprès des randonneurs et des visiteurs. La laine Mérinos fait également partie de l’héritage autour de l’élevage des brebis avec différents savoir faire comme les cardeurs et la tonte. L’association a créé un regroupement d’éleveurs membres du collectif CPMA (Collectif pour la promotion du mérinos d’Arles) pour dynamiser cette matière noble en produisant des vêtements issus de la laine mérinos. L’association veut faire connaitre la transhumance comme une pratique d’avenir. Aujourd’hui les bergers ont développé la protection de leurs troupeaux, le partage de l’espace en montagne avec les pratiquants d’activités de pleine nature. Il faut savoir que la montagne est un véritable espace de travail et que les éleveurs louent l’herbe des alpages. La transhumance à pied a historiquement créé des liens immuables entre la Provence et le Piémont italien. Les bergers italiens venaient proposer leurs services sur les foires d’Arles et de Salon de Provence et emmenaient les troupeaux l’été dans le Piémont.
Profession Berger
L’école du Merle en Provence dispense une formation spécifique de berger d’alpage avec énormément de pratique au sein d’élevages et de gardiennages en colline en hiver et en alpage l’été. Le métier de berger proprement dit a beaucoup évolué et exige de la pratique: guider et anticiper le troupeau, connaître la météo et savoir soigner ses bêtes. L’aspect administratif est également très présent au quotidien et les bergers sont contraints par de nombreuses réglementations. Des expertises sont exigées en cas d’attaque des troupeaux par des loups afin que la perte des bêtes soit remboursée. D’autres aides sont prévues pour les chiens de protection, leur nourriture et une partie de leurs soins vétérinaires.
Une figure omniprésente dans l’oeuvre de Jean Giono
La transhumance a inspiré l’œuvre littéraire de Jean Giono, un enfant du pays, qui évoquera dans divers textes le monde du pastoralisme et des paysages ruraux. Giono comparait la multitude des troupeaux au fleuve de la Crau à Manosque où il vécut une grande partie de sa vie. L’écrivain a particulièrement affectionné le personnage du berger dans son oeuvre. Dans son ouvrage Le Serpent d’étoiles le berger fait figure d’initiateur, garant de l’harmonie cosmique. Nous vous invitons à écouter notre podcast en cliquant ici.
Les fêtes de la transhumance
Ces fêtes célèbrent dans différents villages de Haute Provence le pastoralisme ainsi que les musiques et les danses folkloriques locales. Au cours du mois de Juin le public pourra découvrir entre le 9 et 25 juin prochain cette tradition festive successivement dans les villages de Castellane, Jausiers et Riez. La transhumance , soulevant un immense nuage de poussière, traverse les villages . Des badauds se mêlent au troupeau qui souvent engorge les ruelles au son des clochettes et des sifflements des bergers les accompagnant. Des groupes folkloriques interprètent des chants traditionnels en vieux provençal tandis que se déroule en serpentins une farandole au son des galoubets et des tambourins. Les lavandières, vêtues de costumes traditionnels , feront ponctuellement des démonstrations de lessives à la cendre. Divers marchés locaux, sur fond d’orgue de barbarie, proposent des produits locaux dont l’incontournable fromage de chèvre de Banon AOP, des pistaches, olives et amandes du plateau de Valensole ou encore du miel de lavande de Haute-Provence. Alors êtes-vous prêts à « far la routo » dans les Alpes de Haute-Provence?
© Texte & Photos Katherine HIBBS
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Y aller
TCV Paris-Gare de Lyon – Aix en Provence
Prévoir une location de voiture à la gare pour rayonner ensuite entre Manosque, le plateau de Valensole et Riez
Où dormir
À Manosque
Hôtel du Terreau
21 Pl. du Terreau, 04100 Manosque
Tel: 04 92 72 15 50
À Riez
On a adoré cet hôtel atypique par lequel on accède en traversant sa boutique. Une adorable perruche viendra spontanément se poser sur votre épaule.
Petit déjeuner dans le jardin de l’hôtel.
Hôtel des Colonnes
52-54 Rue René Cassin, 04500 Riez
Tel : +33 (0)4 92 72 29 24
www.hoteldescolonnes-riez.fr
Où manger
Le Jardin de Celina à Valensole
www.lejardindecelina.com
310, rue du 18 aout 1944
Ancien chemin d’Allemagne
04210 Valensole
FRANCE
Tel. +33 (0)4 92 74 83 35
Acheter du miel
Ludovic FORNO apiculteur à Valensole
Tel. 06 76 33 44 69
Les fêtes de la transhumance
Castellane du 9 au 11 juin
Jausiers du 10 au 11 juin
Riez le 25 juin
Renseignements : www.alpes-hautes-provence.com
Les itinéraires de la transhumance à pied: www.larouto.eu
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