Ce mardi 4 Octobre a eu lieu dans le grand auditorium de la Seine Musicale le concert Divine Féminin sous la houlette de Solrey, à la fois cheffe d’orchestre à la tête de son quintet à cordes Traffic Quintet et créatrice de la vidéo en bande passante sur l’écran géant de la Seine musicale. Très inspirée par de grandes figures féminines au parcours trop souvent jalonné de souffrances et d’un manque de reconnaissance, Solrey a repris ce spectacle présenté il y a plusieurs années. L’artiste a non seulement mis en lumière ses arrangements conjointement à ceux de Jean-Pascal Beintus et d’Alexandre Desplat sur de célèbres musiques de compositeurs de musiques de films mais aussi une création visuelle. Sur un écran géant se sont succédées des séquences montées sur des oeuvres du peintre Jacques Monory filmées par Solrey dans l’atelier de l’artiste ainsi que des images en mouvement d’Ange Leccia, morceaux choisis de destins tragiques. Les cinéphiles se sont délectés et les néophytes ont été, quant à eux, transportés par une éblouissante interprétation musicale.
Solrey et son ensemble à cordes le Traffic Quintet © DR
Destins de femmes
Parmi les séquences projetées derrière le quintet, on restera marqué par La Vague sculptée de Camille Claudel sans oublier la vision subjective de l’enfermement psychiatrique de l’artiste à travers les barreaux du fourgon qui l’emmena loin de Paris. Les séquences s’enchaînent à la manière d’une tragédie grecque, tant appréciée par Solrey qui a elle-même revendiqué cette liberté d’expression indispensable à la création. L’artiste est incontestablement bercée par le mythe universel de Médée,figure mythologique complexe évoluant de la lumière vers l’obscurité. La musicienne nous partage à travers sa narration visuelle et l’interprétation de son quintet à cordes, son empathie pour des femmes au destin tragique: Virginia Woolf s’enfonçant dans les eaux sombres les poches remplies de cailloux ou encore Marylin Monroe tournant autour d’un arbre en forêt dans les Misfits avant de s’éloigner dans l’obscurité pour l’éternité. Dans la pénombre de l’auditorium de la Seine Musicale j’ai pu observer dans un carré de lumière, les ombres portées des mains de Solrey, énergiques, sobres, décrivant les gestes à la fois gracieux et fermes d’une cheffe d’orchestre nous embarquant dans son univers. Ces mêmes mains ont savamment assemblé les images au montage après les avoir filmées.
Extrait Camille Claudel-Spectacle Divine Féminin © DR
Solrey: « Je pense que la musique permet d’exprimer une douleur et un désespoir immenses tout en restant supportables. J’ai moi-même transformé la faiblesse d’une maladie à laquelle j’ai été confrontée en force guerrière. Cela m’a permis de me dépasser et d’inventer tout un monde pour m’échapper grâce à une palette artistique. Par ailleurs, de manière plus générale, les femmes ont toujours dû se battre pour atteindre la reconnaissance. Dans les années 75-80 des artistes féminines subissaient encore l’humiliation de voir tous les musiciens quitter la scène à leur arrivée. Les acquis ne le sont jamais de façon permanente, il faut sans cesse alimenter la parole de liberté et d’indépendance. Un de mes professeurs,Gabriel Bouillon, dont j’ai été la dernière élève, était le beau-frère de Joséphine Baker. Cette femme avait beaucoup d’humour et une réelle excentricité et elle a pu ainsi plus facilement véhiculer sa pensée et ses convictions « .
Très jeune, Solrey faisait déjà des enregistrements de musiques de films en collaborant avec les plus grands compositeurs tels que Michel Legrand ou Alexandre Desplat, laissant ainsi derrière elle la rigueur de l’apprentissage de la musique classique.
Solrey à la Seine Musicale© DR
La Renaissance
» Durant mon enfance, tous les vendredis après l’école, je jouais au violon dans le cadre de mes études des concertos de Vivaldi et de Bach dans les églises romanes de Normandie. Après toutes ces années en tant qu’interprète, il était important pour moi d’avoir un rapport avec des compositeurs vivants et non plus ceux du répertoire des morts ! Je suis très attachée à la notion de spectacle vivant en faisant des arrangements et j’aime sculpter les oeuvres musicales en les adaptant pour écrire une nouvelle histoire. En tant que cheffe d’orchestre je suis interprète et en tant que créatrice j’ai filmé des images au Musée Camille Claudel et dans l’atelier du peintre Jacques Monory avant de procéder à l’assemblage d’images incluant également les oeuvres d’Ange Leccia. J’ai souhaité mettre en miroir l’oeuvre de ce peintre avec des scènes de cinéma autour de femmes sacrificielles. J’adore monter des images, c’est un puzzle que l’on peut articuler à l’infini, c’est extrêmement créatif ! « .
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Divine Féminin
Un spectacle de Solrey avec son Traffic Quintet
Création vidéo de Solrey sur des oeuvres de Jacques Monory et Ange Leccia
Production: Equipes de Galilea Music et SBO Production.
Le Vinyle Divine Féminin sera disponible très prochainement dans les magasins FNAC à Paris et en régions.
Texte de Katherine Hibbs © Tous Droits Réservés.
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